Les négociations entre partenaires sociaux sur le pacte de
responsabilité de François Hollande ont commencé vendredi dans un climat plutôt
tendu. Au 55, avenue Bosquet, à Paris, les négociateurs des syndicats et du
patronat se sont retrouvés un peu contraints et forcés par le gouvernement.
Principal objectif : s'entendre, autant que faire se peut, sur les fameuses
"contreparties" évoquées par le président de la République, en
échange de la suppression de 30 milliards de cotisations patronales de la
branche famille de la Sécurité sociale. Et, comme d'habitude, la ligne de front
est très claire. D'un côté, la CGT et FO qui refusent le pacte, considéré comme
un cadeau au patronat. De l'autre, les syndicats plus réformistes (CFDT, CFTC,
CFE-CGC) qui se disent prêts à travailler avec le Medef, à condition qu'il
accepte des contreparties.
"Ce n'est pas un face-à-face patronat-syndicat"
"C'est un pacte qui ne nous engage pas et ne nous
concerne pas", a clamé, à peine arrivée, Marie-Laurence Bertrand, la
négociatrice de la CGT, devant micros et caméras. La centrale de Thierry
Lepaon, qui ne croit pas aux allègements de charges déjà existants, réclame
d'urgence l'évaluation de leurs effets sur l'emploi ! Stéphane Lardy a, lui,
dénoncé au nom de FO un "exercice de communication entre le président et
le Medef qui refuse de s'engager sur des contreparties". S'ils ne sont pas
allés jusqu'à pratiquer la "politique de la chaise vide", c'est tout
comme.
La CFDT est en revanche venue "chercher des engagements
du Medef et vérifier que l'on partage un projet commun", a prévenu sa
représentante Véronique Descacq. Celui de la CFTC s'est, lui aussi, montré
beaucoup plus ouvert que FO ou la CGT : "Ce n'est pas un face-à-face
patronat-syndicat. On va essayer de faire un côte à côte."
Joseph Thouvenel joue le réalisme : "On ne sortira pas
en disant : on va créer tant et tant d'emplois. Ce n'est pas vrai." Tout
simplement parce que l'évolution du chômage dépend avant tout du contexte
économique : qu'une nouvelle crise des subprimes se déclenche et le pacte de
responsabilité sera sans effet ! Au passage, il ne s'est pas privé pour
égratigner le Medef. "On ne peut pas se balader avec un badge Un million
d'emplois, parce que ça s'appelle de la démagogie." "Le chiffre d'un
million d'emplois, c'est une ambition", lui répond le Medef. Le compromis
qui se dessine apparaît de plus en plus clair. Les contreparties, terme que le
négociateur patronal récuse, seront négociées par branche, et même affinées
"par secteur", voire par entreprise, au plus près des réalités
économiques de chacune. Jean-François Pilliard cite notamment l'emploi des
seniors, l'emploi des jeunes et les évolutions de qualification des salariés.
"On risque de pédaler dans la semoule"
Mais même concernant ces domaines ciblés, les engagements
pris seront des "engagements de moyens" plus que des engagements
chiffrés. Et de citer l'exemple d'une branche qui pourrait se fixer l'objectif
de prendre 10 000 alternants supplémentaires. Pour le Medef, il est donc hors
de question de prendre des engagements contractuels. "Une entreprise n'est
pas un ensemble bureaucratique. Elle fonctionne quand elle a un carnet de
commandes, des clients, un environnement favorable", a-t-il martelé. Dans
certaines branches, la négociation sera relativement facile ; dans d'autres,
"on va pédaler dans la semoule", prévient le négociateur CFTC, pour
qui l'emploi n'est qu'un objectif de "moyen", voire de "long
terme". Thouvenel met volontiers en avant l'impératif de montée en gamme
des produits français pour affronter la concurrence internationale. Un travail
sur la compétitivité "hors coût" qui passe par la formation et
l'investissement. Investissement qui ne sera pas suffisant tant que les
entreprises dégageront des marges aussi faibles qu'actuellement, estime le
Medef.
C'est aussi pourquoi rien de concret ne sera décidé avant
fin mars, c'est-à-dire avant que le gouvernement n'ait abattu ses cartes, non
seulement sur les baisses de charges, mais aussi sur la fiscalité des
entreprises et le choc de simplification, autres aspects importants du pacte
pour les entreprises. Les partenaires sociaux seront alors obligés d'entrer
dans le dur. Sur le terrain.
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